L'illusion technicienne

Publié le par Jean Coulardeau

Propos introductifs au Café philo de Montpellier

 

  Merci d'être venus, alors que vous ne me connaissez pas. A vrai dire le risque est pour moi, sans parler de la réputation de celui qui a intercédé pour que je sois invité ! Ne me serais-je pas fourré dans la gueule du loup ?

   Basta! Comme on dit dans les régions de vignoble : le vin une fois tiré il faut le boire.

   Alors buvons ensemble!

    Pour commencer je vous propose, en apéritif, ce qui constitue l'originalité de l'école de pensée à laquelle je me suis naturellement rallié.

   Pour les pionniers : Ellul et Charbonneau, et beaucoup d'autres que je connais moins, les conséquences de l'existence d'un outil ne dépendent pas de l'usage que l'on en fait. Elles appartiennent à l'outil.

    Plus l'outil fait appel de la technique élaborée, plus il échappe au contrôle humain.

   Plus il façonne la société qui l'utilise. Ce qu'Ellul appelle le système technicien.

- Je peux dire que je ne tuerai pas mon voisin avec un marteau.

- Je ne peux jamais dire que je ne tuerai pas quelqu'un avec ma voiture !

- Je peux laisser l'ordinateur chez le marchand, la société n'en sera pas moins formatée à son image !

  Quelles que soient les sécurités mises en place, un jour ou l'autre un avion tombera. Plus les sécurités sont importantes plus nous nous croyons invulnérables et plus nous prenons des risques qui auront des conséquences dramatiques, un jour. Comme cet homme qui se tapant sur la tête avec un marteau, mettrait un coussin de plus en plus épais au lieu de s'arrêter. A un moment donné il finira par s'écraser.

   Il n'y a pas d'autres choix que de renoncer à l'outil ou d'accepter tous les aspects de son existence. Si vous voulez qu'une ambulance vous conduise rapidement à l'hôpital, vous devez accepter la circulation automobile qui permet son existence, donc le prix à payer de votre prise en charge : plus de 5.000 morts par an sans compter les blessés et tout le reste, destruction des ressources pétrolières, pollution, etc...

   Toute tentative de solution au problème posé par l'existence d'une technique, fait apparaître un problème plus grave à régler demain. La consommation d'énergies fossiles produit des gaz à effet de serre. Qu'à cela ne tienne, l'énergie nucléaire n'en produit pas, seulement des déchets pour des milliers d'années, voire des millions.

   Toute proposition écologique qui reste dans l'esprit technicien ne sert à rien. Au contraire! elle donne bonne conscience, elle endort!

 

     L'ordinateur se présente comme l'achèvement de l'illusion technicienne :

 - Illusion de liberté, alors qu'il ne peut exister que dans une société liberticide et qu'il n'est pas accessible à tout le monde sur terre. Que se passera-t-il lorsque les habitants du tiers-monde comprendront, enfin!, qu'ils courent derrière un mirage?

 - Illusion de survie : alors qu'il nous conduit à la mort, ne serait-ce que par les bombes atomiques qu'il a permises et qu'il fera exploser.

 - Illusion de puissance : les encyclopédies prétendaient réunir le savoir, mais leur multiplication montrait bien que le savoir ne s'unifie pas. Tandis que l'ordinateur donne cette illusion, nous laisse croire que nous allons y parvenir. Et quand bien même parviendrions-nous au savoir matériel intégral, nous serions loin de la connaissance du vivant, de sa compréhension, de son amour.

   Quand nous aimons quelqu'un, nous ne nous contentons pas de sa description biologique, aussi complète soit-elle. Nous en voulons plus et cela n'entre dans aucun ordinateur.

- Pouvons-nous faire une société d'amour avec un ordinateur?

 

- Pouvons-nous faire une société d'amour, dans une société où l'organisation est réglée par un ordinateur?

- Non, bien entendu! Car l'amour n'entre pas dans les programmes, ne se programme pas.

    Il serait temps de nous réveiller et de comprendre que la technique nous conduit à notre perte. Au lieu de faire tout ce qui est techniquement possible et qui uniformise le monde, retrouvons des valeurs éthiques, retrouvons la diversité culturelle.

   Revenir en arrière ne serait pas une régression, car nous l'aurions voulu, choisi, décidé. 

 

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C
<br /> <br /> Blog(fermaton.over-blog.com).No.13- THÉORÈME DE BABEL.<br /> <br /> <br /> L'Oublie est un VOLEUR ?<br /> <br /> <br /> <br />
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D
"Revenir en arrière ne serait pas une régression, car nous l'aurions voulu, choisi, décidé." Ce n'est pas sérieux. Une civilisation ne donne l'impression de revenir en arrière que quand elle se libère pour aller de l'avant, comme les pays du socialisme féodal quand ils sont tombés, enfin, dans l'économie de marché. Un mur tombe alors et une route s'ouvre, comme le mur de Jérusalem tombera un jour et on pourra alors avoir un Moyen Orient pacifique. Mais il faudra d'abord que les USA ne soient plus la première puissance mondiale. Et c'est bien là l'enjeu. Ceux qui s'enferment dans un état antérieur de développement ne savent être que les victimes, les esclaves, au mieux les méprisés de ceux qui dominent le monde. C'est ce que les Chinois, les Indiens, les Vietnamiens et quelques autres ont enfin compris: ramenez les USA à leur niveau nécessaire de second, au moins, et nous pourrons alors envisager un autre monde, mais pas avant. Dr Jacques COULARDEAU
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J
<br /> <br /> Que mon honorable frère s'intéresse à mon humble travail, voilà qui me réjouit ; qu'il ne relève qu'une phrase d'un commentaire, voilà qui me rassure ; qu'il signe son texte de son titre de<br /> Docteur, voilà qui m'honore.<br /> <br /> <br /> Que puis-je répondre à une assertion garantie par la doctorale signature ?<br /> <br /> <br /> Jean Coulardeau<br /> <br /> <br /> <br />