Article de " La Galipote "

Publié le par James Gressier

…Où vas-tu Coulardeau ?

 « L’ordinateur, dernière Tour de Babel »,

                                                          aux Editions « La Galipote ».

               Comme aurait pu le dire Blaise [Pascal, nous sommes en Auvergne, ndlr] : tant qu’il y aura des hommes et qu'ils pensent, il y aura sur terre des Jean Coulardeau. Il y aura même des livres. Et non seulement des livres qu’on publie et qui pensent mais, en plus, qui nous font penser. Ce qui n’est pas la règle générale car penser est un risque que tout le monde n’est pas prêt à prendre. Un risque, en fait, qui ne nuirait pas plus que de lire comme tout le monde du Lévy, que ce soit Marc ou BHL, ces voyagistes du best-seller qui nous mènent en bateau.

 

 

          

 

 

            Pour commencer, il y a le plaisir direct, physique sinon sensuel, du livre qu’on prend en main, bien imprimé, compact et pourtant large, qui s’ouvre bien, qui met d’emblée le texte et son lecteur à l’aise. Si j’étais l’éditeur, j’en serais fier. Je ne suis pas l’éditeur. Je pars seulement du principe qu’il faut que certaines choses se sachent. [Merci Félix, nous sommes touchés ! – ndlr]. Des choses qui n’ont pas de prix et ne vous rapportent rien.

            Au long du texte où l’auteur va son train, on a prévu de larges marges comme des voies de dégagement. L’essentiel nous y est rappelé, plus des notes bien placées qui nous évitent de courir on ne sait où. Gallimard finira par piquer l’idée, sinon il aurait tort. Les marges ont un autre avantage : si on a un crayon en main, on y met ce qu’on pense soi-même, on approuve, on conteste, et le dialogue commence. On a le droit de penser aussi.

 

 

           Le Jean Coulardeau, on le voit venir : il n’a pas fait Saint-Cyr ni la rue d’Ulm. On s’en réjouit d’avance. Gros à parier qu’il est comme nous : autodidacte. Il a dû faire son catéchisme mais passer par la communale. Ce double départ l’aura marqué. Il pense en judéo-chrétien qui aurait lu Voltaire. On peut dire qu’il pense bien, sans être bien-pensant, et c’est le début d’une aventure au pays des Lumières et des contradictions. On croirait du Jean-Jacques Rousseau revu par l’abbé Pierre. Dans les coulisses de notre monde nouveau, l’ordinateur plutôt que le pape tire maintenant les ficelles. Apparemment, personne ne sait encore si le profiteur est le CAC 40, Big Brother ou l’Etre Suprême.

            Tout porte à croire que Jean Coulardeau a fait mai 68, mais sa revendication a continué le chemin, elle va plus loin que toutes les manifs. Elle traverse la philosophie, atteint la spiritualité : « La Chute », nous explique-t-il, a dispersé la conscience dans tout l’univers, « pour retrouver l’unité il ne faut pas éliminer mais rassembler ». La Vérité est dans le Tout vers lequel nous devons tendre, c’est un diamant mais chaque facette nous éblouit, alouettes que nous sommes. On dépasse Cohn-Bendit pour aller vers Teilhard, mais sans rien perdre en route. Même quand on vient de Babel, il faut bien vivre avec son temps et, en plus d’Internet, on parlera du sexe, du sida, des anars… Par principe on ne sacrifie rien, quitte à se prendre les pieds dans les bagages.

            A chacun de faire son tri sur la piste de l’auteur. Chaque idée y offre une balise au chemin de croix de l’erreur humaine. Dans cette pêche à la Vérité, « le net » jette son filet, mais c’est nous  qui sommes pris. Rien de nouveau depuis Babel. Nasse perpétuelle où nous nous débattons depuis la gaffe d’Adam. Allez donc voir chez Kant, Saint Augustin ou Nietzsche si on s’y débat mieux et plus clairement!

            Et allez donc savoir s’il faut ou non casser l’ordinateur !... Est-ce une bonne chose que tout le monde parle le même langage ou faut-il que chacun ait le sien pour cultiver sa différence ? L’alliance de la puissance et de la connaissance fait-elle le beurre de Jéhovah ou celui, rance, du Grand Satan ? La terre n’est-elle peuplée que d’innocents sauvages et de savants hypocrites ? Devons-nous diriger nos vies vers l’ordre et son ennui, ou plutôt vers les joies douloureuses du désordre ? Faut-il être de gauche ou de droite, romantique ou classique ? A croire que, depuis le Déluge et même avant, la question est toujours la même: devons-nous nous soumettre ou reprendre nos billes ? Le balancier oscille et le sablier coule. A vous, êtres humains, d’inscrire vos notes en marge dans le temps qui est imparti. Jean Coulardeau vous y invite. On attend les réponses.

            Irons-nous jusqu’à dire que tout ça nous dépasse tant qu’on peut jouer aux boules en attendant le vingt heures ?

 

                                                                     Félix LAJOIE (pseudo de James Gressier)

 Publié dans « La Galipote » n° 113, décembre 2006

 

 

 

 

P.S. …ce livre adressé à un détenu de la prison de Villenauxe-La-Grande (10) a été saisi, il ne lui sera remis qu’à sa libération. La direction de la prison aurait-elle craint que sa couverture ne soit un message codé ?

 

 

 

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M
voilà une présentation bien alléchante ! c'est pas tout ça, mais il faudrait que je me dépêche de le lire moi aussi !! amitiésMireille alias cerise ;-)
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